Intervention de Stéphane Baly sur le Rapport d’orientation budgétaire 2025
Madame le Maire, mes chers collègues,
Vous l’avez rappelé dans vos différentes interventions, la situation budgétaire dans laquelle nous sommes est inédite.
Ce débat sur les orientations budgétaires de la Ville ressemble cette année davantage à un rapport de désorientation budgétaire tant nous ne savons pas de quoi l’année 2025 sera faite !
L’effort annoncé était de 5 milliards demandé aux collectivités territoriales pour 2025.
C’est ou c’était (avec un gouvernement démissionnaire, un nouveau premier ministre toujours minoritaire, un PLF en jachère le conditionnel devient parfois un impératif !), environ une vingtaine de millions d’euros pour Lille.
Cet effort serait amoindri pour les communes les plus pauvres, ce qui réduirait l’effort à 12 millions pour Lille. La Ville a mené une campagne de communication choc à ce propos, dénonçant cette demande absurde de la part de l’État. J’ai déjà eu l’occasion d’exprimer mon soutien à cette campagne. Un soutien que je réitère ce soir.
Que ce soit des milliards ou des millions, personne ne se les représente. Par contre, la suppression des crèches ou des EPHAD, ça permet de prendre conscience de l’ampleur de la coupe budgétaire envisagée.
Nous étions soulagés par la chute du gouvernement, qui – qu’on soit un ou une député du Nouveau front populaire ou simplement un ou une élu local attaché à son territoire – signifiait surtout la chute de ce projet de loi de finances intolérable pour les collectivités territoriales.
Ne restaient plus que les députés de la minorité présidentielle, dont Madame Spillebout, pour défendre encore ces coupes franches.
Le sentiment de soulagement a rapidement laissé place à l’incertitude et surtout à l’inquiétude. Peu importe le projet de loi spécial promis par le Président de la République, celui-ci sera remplacé par un PLF rectificatif en 2025.
La menace de l’austérité qui planait, plane encore. Le prochain gouvernement Bayrou pourrait décider de remettre sur la table ces projections de coupes budgétaires. Sans que nous sachions pour l’instant à quelle hauteur. Construire un budget 2025 dans ce contexte est un casse-tête duquel les collectivités ne sont pas prêtes de sortir.
En l’état, il est donc difficile pour nous de commenter les « choix » qui figurent dans ce ROB, et qui s’apparentent plutôt à de l’affichage d’une volonté politique.
Il est écrit que la Ville souhaite : « maintenir le niveau global de [son] soutien aux associations en 2025. » Mais que : « Toute contribution imposée à notre collectivité pour le redressement des finances publiques par le projet de loi de finances en cours de discussion vient complexifier la tenue de cet engagement ».
Comment juger cet « engagement » qui n’est en fait qu’un souhait ? D’autres collectivités ont fait le choix de repousser leur ROB, ce que nous comprenons.
De fait, nous devrons très probablement voter en février des ajustements majeurs.
Aussi, profitons de ce temps qui nous est accordé, non pour réitérer les éléments importants que nous avons pu répéter au cours des quatre précédents exercices, mais pour rappeler au gouvernement, qui tente de nous imposer l’austérité budgétaire, quelques réalités dont il ferait bien se rappeler.
Dans un contexte où la transition écologique est enfin mise en avant par l’État qui pousse par exemple à la rénovation thermique des bâtiments, rappelons que 70% de l’investissement public est porté par les collectivités ! Rappelons également que les efforts demandés aux collectivités reposent sur la volonté de l’État de réduire le déficit public, déficit créé par l’État, puisque les collectivités doivent présenter un budget à l’équilibre, ce qui n’est plus arrivé à l’État depuis des décennies !
Les rengaines sont connues : notre masse salariale serait trop importante, nos dépenses excessives, etc, mais les fonctionnaires territoriaux ne représentent que 34% des fonctionnaires ! Et par ailleurs, comment mener une politique de transition écologique et de justice sociale sans agent pour la piloter ? L’État est donneur de leçons, qu’il oublie de s’appliquer à lui-même…
Il aurait pourtant dû retenir une leçon : celle de l’échec de la réduction de la fiscalité comme levier en faveur de la croissance économique. Ce sont les suppressions fiscales successives et tout azimut depuis 8 ans qui ont construit l’impasse budgétaire nationale dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui.
En affectant des fractions de TVA aux collectivités pour compenser la suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE, l’État restreint ses recettes tout en nuisant à l’autonomie fiscale des communes et intercommunalités… c’est du perdant-perdant !
Plutôt que de retenir cette leçon, reconnaître cet échec de 7 années d’une politique fiscale désastreuse, ce sont les collectivités qui sont pointées du doigt. Aujourd’hui ce sont elles qui tiennent le pays. Reste à savoir pour combien de temps…
Disons le : comment garantir un soutien aux associations avec ces contraintes financières, et alors que c’est le budget de fonctionnement qui est visé par l’État
Maintenir le soutien aux associations est pourtant une nécessité. Une baisse du soutien aux associations qui forment un amortisseur social indispensable ne serait pas acceptable. Permettez-moi une nouvelle fois de rappeler qu’une reconduction à l’euro près revient à une baisse dans la mesure où l’inflation n’est pas compensée.
Face à cette situation incertaine, vous avez déjà dû commencer à identifier quelles dépenses pourraient être amputées, car disons-le, la probabilité que le prochain gouvernement nous impose l’austérité est hélas grande. Puisque ce sont les dépenses de fonctionnement qui sont visées, il est d’autant plus urgent que les investissements perdurent.
C’est en investissant fortement dans la transition écologique que nous pourrons diminuer nos dépenses de fonctionnement, en réduisant nos dépenses énergétiques. La masse salariale ne peut en aucun cas être un terrain de coupes, nous devons protéger nos agents qui sont les artisans de notre projet pour la Ville, et sans qui aucune politiques publiques ne sont possibles.
Je vous remercie pour votre attention.