Stéphane Baly interroge le mode de financement des associations environnementales

Madame le Maire,

J’interviens ce soir sur la délibération n°24/57 qui liste les associations retenues dans le cadre de l’appel à projet nature 2024, mais j’aurais pu intervenir sur d’autres délibérations qui concernent des appels à projets lancés pour 2024.

Les financements par appel à projet sont moins sécurisants pour les associations que les subventions de soutien à l’activité. D’ailleurs l’omniprésence des appels à projet de l’État depuis l’élection d’Emmanuel Macron dans l’aménagement du territoire et la politique de la ville a été vertement critiqué par les associations d’élu-es dont l’AMF. Pourquoi reproduirions-nous ce que nous sommes prompts à dénoncer ailleurs ? Une situation sur laquelle même l’État revient en arrière ! Le fond vert repose sur une attribution avec des critères d’éligibilité et non un appel à projet.

Nous ne remettons pas en cause le principe même de l’appel à projet et un appui à l’innovation. C’est sa place démesurée dans le financement aux associations environnementales que nous dénonçons. Nous avons recensé l’ensemble des délibérations de subventions aux associations environnementales depuis 2019. Quelle évolution ? la part du financement par appel à projet représentait 8% du financement aux asso en 2019… 61% en 2023 !

Au delà d’un volet purement comptable, c’est bien une différence fondamentale de relation entre la ville et les associations que nous exprimons. Une convention, c’est une relation partenariale entre la ville et l’association. Plus précisément ce sont deux acteurs qui écrivent ensemble un projet. L’appel à projet est directif. C’est la vision de la collectivité à laquelle les associations doivent s’adapter. De partenaires dans la co-construction de la politique lilloise, elles deviennent des prestataires de votre projet municipal.

Le transfert de convention vers des appels à projet amène à des situations ubuesques.

Citons par exemple le cas de l’association Lisière(s). qui figure dans les bénéficiaires de cette délibération 24/57. Lisière(s) a une convention d’occupation avec des engagements notamment en nombre de jours d’ouverture sans aucun moyen de fonctionnement. Pour avoir les moyens juste d’ouvrir le jardin conformément à la convention d’occupation, Lisière(s) a dû répondre à un appel à projet ! Elle percoit ce soir une subvention de 10 000 euros en réponse à un appel à projet. Avant 2023, l’association était financée par un soutien à l’activité du même montant, et ne dépendait donc pas des appels à projet de la Ville de Lille pour juste respecter la convention d’occupation !

Certaines associations qui percevaient avant 2023 des subventions de soutien à l’activité doivent aujourd’hui compléter leurs financements par des appels à projet. C’est le cas des AJOnc, qui va percevoir ce soir une subvention de soutien d’un montant de 14 000 euros, et un financement par appel à projet de 44 000 euros. Avant 2023, ils percevaient 59 000 euros en soutien à l’activité. Un appel à projet ce sont des dossiers chronophages qui participent de ce sentiment d’étouffement que décrivent les responsables associatifs. … Des associations aussi ancrées à Lille ne risquent pas de disparaître du jour au lendemain. Pour de telles structures, nous devrions plutôt essayer de tendre vers des conventions pluriannuelles de financement pour apporter davantage de stabilité et de visibilité à un secteur associatif en grande difficulté.

D’ailleurs, si nous avons voté pour une actualisation de la charte qui recense les obligations des associations subventionnées par la Ville au dernier conseil, n’oublions qu’une autre charte votée en 2012 est toujours active : celle qui définit les engagements réciproques des associations et la Ville de Lille. Dans cette charte, co-signée par plusieurs réseaux associatifs : l’APES, la CRESS, France bénévolat, la MRES, l’URACEN, l’URIOOPSS, on peut par exemple y lire que la recherche de conventions pluriannuelles d’objectif est à encourager. Peut-être ferions-nous bien de nous assurer de respecter nos propres règles.

A la place, vous faite le choix de l’appel à projet, ce choix du one-shot annuel.e choix est politique. Étonnamment ce choix est spécifique au pôle transition. Fallait-il faire table rase des liens tissés précédemment avec le réseau associatif écolo ?

Je vous remercie pour votre attention.