Mesdames, Messieurs, cher.es collègues,
Ce soir sont présentées 2 délibérations relatives à un appel à projet annuel aux associations de nature et de défense de la biodiversité. Des délibérations récurrentes mais qui semblent entériner des constats qui appellent à réfléchir à une évolution de l’appel à projet.
Dans un contexte où à tous les niveaux, la biodiversité est la mal aimée des politiques de transition écologique, dans un déséquilibre de plus en plus marqué qui entérine la priorité climat et invisibilise le vivant, tandis que les scientifiques alertent sur le rythme sans précédent des disparitions d’espèces, insectes, avifaune en tête.
Il faut cesser de sous-estimer la puissance de cette alliée qu’est la biodiversité pour le climat, pour la santé, pour prendre soin des lillois.es et des espèces.
Malgré notre statut de territoire artificialisé, malgré la rareté des espaces naturels et des massifs forestiers dans notre région, la ville de Lille a un rôle encore essentiel à jouer pour mieux polliniser ensuite.
Nous avons des bases, solides, depuis la création d’une délégation aux abeilles et à la biodiversité, la reconnaissance par des prix nationaux qui sont le reflet de l’aspiration citoyenne pour la nature et de l’engagement des services – nous voulons faire hommage à ces bases posées par des élu.es écologistes pour mieux aller plus loin.
Le rachat de foncier dans les zones les plus carencées, le rééquilibrage des grandes voiries vont dans le bon sens, mais pour garantir d’avoir une balance positive à la fin de ce mandat cela ne suffira pas.
Car à l’heure actuelle, nous construisons encore sans végétaliser les façades, et sans mesures suffisantes pour préserver l’avifaune,
nous planifions des travaux sans référence à de potentiels corridors de biodiversité ou à leur interconnexions,
nous constatons trop souvent après coup les arbres abattus par des promoteurs,
nous lisons des études d’impact qui s’appuient sur des inventaires de biodiversité réalisés trop vite et parfois au mauvais moment,
nous avons même artificialisé une zone que tout le monde savait humide,
sans cesse les logiques spéculatives sur le foncier invisibilisent l’arbre et grignotent des espaces jugés sans intérêt.
Nous devons inventer de nouvelles manières de faire, de voir, de penser.
Nous devons miser bien plus sur la capacité transformatrice de la société civile.
Cela commence par cet appel à projet. Dans ces 2 délibérations les actions de sensibilisation priment très nettement. Par exemple, 11 chantiers et 13 suivis naturalistes « pèsent » moins que 16 animations, 12 000 euros contre 20 000 euros.
Nous devons inverser cette tendance, et inciter plus fortement les associations, et pas uniquement les associations naturalistes, à se saisir pleinement du terrain de jeu que constitue notre ville.
Un terrain de jeu pour des opérations de dé-bétonnisation et de plantation participatives, comme au Canada, pour des revitalisations de petits délaissés, comme cela se pratique déjà dans notre métropole, pour des micro-trames verte, car les rues jardins sont des rues de jardinier, pour des plantations en façade coordonnées.
Pour de telles actions, le savoir-faire des associations est indispensable ; mais pour les inciter à proposer la création de ces futurs hot spots de biodiversité, il faut inciter beaucoup plus fortement, et cela passe par l’évolution de cet appel à projet. Car si la sensibilisation est essentielle, la meilleure sensibilisation reste l’émotion que procure le contact avec la nature. Et nous devons garantir que chaque habitant, quel que soit son quartier, puisse s’engager pour la reconquête de la biodiversité.
Forcément, il faudra aussi parler de montants et de budget, de l’accompagnement des services techniques avant de s’attaquer aux plaques de bitume, de la rencontre de ces projets et de cette expertise avec les projets des habitant.es tels que ceux du budget participatif. Et la mesure sans laquelle nous ne pourrons garantir de rendre vraiment service à la Nature : une cartographie détaillée, précise, à l’échelle de chaque rue et quartier, de ces corridors biologiques à créer, à renforcer, à protéger.
L’alliance de ces solutions seront les bombes à graine semées par la ville contre la 6ème extinction.
Forcément, si nous voulons nous attaquer aux 5 facteurs de perte de la biodiversité, il nous faudra aussi prendre à bras le corps le risque des espèces invasives, comme la renouée du japon qui prolifère le long de la Deûle, des routes et des voies. Nous parlons d’un risque que les scientifiques évaluent à 60 % du risque d’extinction de la biodiversité et qui a pleinement sa place dans cet appel à projet.
Il faudra faire du défi de la biodiversité un défi et des totems pour le plus de lillois possible.
L’accompagnement des jardiniers amateurs est aussi une priorité. Non seulement pour éviter les tontes et tailles aux mauvais moments, mais aussi pour que les jardins privés viennent constituer la trame verte et les corridors de biodiversité. Un tel accompagnement a existé dans notre métropole, mais sans se déployer à Lille : les savoir-faire existent, donnons-leur l’occasion de s’exprimer.
Pour résumer,
accompagner les jardiniers pour plus de biodiversité dans les jardins,
soutenir les associations pour créer de nouveaux cœurs et corridors de biodiversité dans les espaces publics,
lutter contre les espèces invasives.
Voici 3 propositions que nous vous soumettons pour que cet AAP ne se contente pas de donner l’image d’une ville nature, mais fasse une ville nature.