Jérémie Crepel commente pour Lille Verte le Plan Local de Promotion Santé

Madame la maire, cher.es collègues,

Difficile de commenter en cinq minutes un Plan local de santé aussi détaillé et exhaustif. Je ne sais pas pourquoi, au sein de Lille Verte, c’est tombé sur moi. Mais ça me fait plutôt plaisir, pas seulement à cause de mon engagement à ce sujet, mais aussi parce que ce sera l’occasion de dire des choses positives, à commencer par le fait que nous voterons ce plan.

Il était nécessaire en effet, d’avoir une stratégie globale en matière de santé pour succéder au Contrat local de santé qui avait été signé en 2012 avec l’Agence Régionale de Santé, et qui n’a pas été renouvelé malgré les travaux préparatoires de la fin du mandat dernier. La ville est depuis longtemps engagée dans la santé, même si ce n’est pas sa compétence obligatoire, ce qui se matérialise par exemple avec sa participation active au Réseau des Villes Santés et de nombreux label, comme celui de ville engagée contre le Sida.

Soulignons d’emblée une des qualités de ce plan : sa co-construction avec l’ensemble des acteurs, sans oublier les plus importants : les usagères et les usagers. Vous auriez pu associer aussi l’opposition, d’ailleurs. Autre qualité importante, celle de capitaliser sur l’existant, comme les pôles ressources santé, créées par Marielle Rengot, et les ambassadrices et ambassadeurs de santé – j’y tiens, s’il vous plait, ne faites pas disparaître les ambassadrices en ne citant que les ambassadeurs dans votre document, la majorité sont des femmes. Mais vous poursuivez et approfondissez ce travail de démocratie en santé en créant le Conseil Lillois de la Santé, qui vient englober et compléter le Conseil Local de Santé Mentale, c’est une très bonne initiative. Vous y placez même les habitantes et habitants au travers de l’assemblée générale, nous vous suggérons de les associer jusque dans son comité de pilotage, par exemple en nommant des ambassadrices et ambassadeurs de santé parmi le collège usagers.

Un autre axe très fort de ce plan c’est l’axe 3 de « Promotion de la santé mentale et de lutte contre les souffrances psychiques », un sujet pour lequel nous partageons avec Marie-Christine Staniec-Wavrant, un engagement fort. Un sujet mis sur le devant de la scène santé avec les confinements. Là aussi, la ville ne part pas de rien puisqu’elle peut compter sur le Conseil Local de Santé Mentale mise en place par Marielle Rengot avec sa commission des cas complexes pour résoudre les problèmes d’accès au soin, ainsi que les Espaces écoutes santé, lancés au mandat dernier pour les usagers du CCAS en souffrance psychique… On salue une nouvelle ampleur avec le plan lillois de souffrance psychique qui va lancer des actions de prévention auprès du jeune public et de formation des personnels en première ligne. Ces personnels sont un maillon essentiel, tant la tâche est immense et la psychiatrie malheureusement sinistrée par des années de désinvestissement de l’État. Ce sont de bonnes directions qui sont prises ici. N’oublions pas la prévention des troubles cognitifs qui débordent littéralement la psychiatrie infantile, par exemple en mettant encore davantage de moyens sur les actions de lutte contre l’exposition aux écrans, qui existent mais méritent d’être développées.

Nous nous retrouvons aussi dans la définition des publics prioritaires : les quartiers prioritaires et personnes précaires doivent bénéficier de l’universalisme proportionné : donner plus à celles et ceux qui ont moins pour se rapprocher de l’égalité réelle. Les familles monoparentales, trop souvent précaires, où les femmes sacrifient trop souvent leur bien-être pour celui de leur famille, la population masculine victime des stéréotypes de genre qui l’incitent à moins se préoccuper de sa santé. Les déterminants de santé, jouent contre la santé des populations précaires et ce n’est pas un hasard si dans notre région nous avons une plus forte prévalence des décès évitables par l’intermédiaire des maladies cardiovasculaires, des cancers ou du diabète. Mais surtout ne stigmatisons pas ces populations en pensant, comme j’ai pu le lire dans le document que « les populations défavorisées sont peu sensibles aux messages de prévention. ». Les populations défavorisées sont avant tout victimes de la pollution, de la difficulté à accéder à une alimentation de qualité, aux soins, ainsi qu’à des activités physiques et culturelles variées. A cet égard, nous aurions souhaité que vous envisagiez les outils intéressants que sont la mutuelle municipale, ou que vous donniez davantage d’élan au sport sur ordonnance, pourtant testé favorablement au dernier mandat dans le quartier Lille-Moulins avec l’association Ciel bleu.

Et c’est là où nous avons un regret. Alors que vous intégrez parfaitement dans les attendus du plan le concept « une seule santé », l’axe sur la santé environnementale intervient en dernier, comme un ajout de plus, au lieu d’irriguer l’ensemble du plan. Vous évoquez bien l’urbanisme favorable à la santé, au travers par exemple des quartiers à santé positive, mais le développement des mobilités actives semble se faire davantage au travers des chemins de la forme, certes intéressants, que de celui du remodelage complet de nos espaces publics pour favoriser la pratique de la marche et du vélo et améliorer la qualité de l’air. Quid aussi des pollutions industrielles pourtant au cœur de l’actualité avec Réfinal et Exide ? Au-delà, c’est sans doute aussi un point de gouvernance de la santé environnementale qui ne devrait peut-être pas être séparée de la santé tout cours.

Je m’arrête là car je l’ai dit, nous avons tout de même un plan très complet, et j’aurais pu citer de nombreuses autres actions positives comme la création de Sentinelles pour le risque suicidaire, l’apprentissage du « savoir-rouler », installation d’un nouveau récupérateur de seringues à Lille-Moulins, le soutien à la création de maisons de santé pluridisciplinaire, le travail avec les universités, la reconnaissance de la culture comme promotrice de santé… Car la santé doit irriguer l’ensemble de nos décisions municipales et c’est pourquoi nous voterons positivement ce plan local de promotion de la santé.