Madame la Maire,
Cher.ères collègues,
Tout à l’heure, nous parlions du plan de lutte contre les exclusions. Nous regrettons que le débat sur le revenu universel, cette aide financière versée sans condition, ait été évacuée dès la première réunion de travail pour la construction de ce plan.
Comme celui-ci n’a pu se tenir dans les réunions de travail, nous l’invitons au conseil municipal.
Nous demandons deux choses :
– de porter ce combat du RUE sans condition ni contrepartie, auprès de l’État et du Département du Nord, compétents en matière d’aide sociale. Au-delà, nous défendons l’automaticité et l’universalité d’un revenu pour toutes et tous, quel que soit sa condition, au-dessus du seuil de pauvreté, sans contrepartie. Le Département du Nord, trop occupé à fliquer les bénéficiaires du RSA, alors que le taux de non-recours est de plus de 30 %, est à côté de la plaque en termes d’accompagnement social. Pour des conditions d’existence dignes, nous croyons que le revenu universel est une des solutions – évidemment adossé à une fiscalité juste, qui impose les grosses fortunes, les millionnaires et les revenus élevés. La redistribution des richesses est une nécessité de justice et de solidarité.
Nous vous demandons également d’envisager une expérimentation locale. Pourquoi ne pas tester sur un groupe d’habitant.es restreint ?
Je vous encourage à regarder ce que la petite ville démocrate de Stockton (300 000 habitants) a fait aux USA qui a des chiffres sociaux comparables aux nôtres (un quart des habitants vit sous le seuil de pauvreté). Disponible sur une carte de débit, le revenu (Stockton Economic Empowerment Demonstration) s’élève à 500 dollars par mois pendant deux ans, et est librement dépensé par les bénéficiaires, sans contrepartie.
Après deux ans d’expérimentation, Premier poste de dépenses ? De la nourriture (40 %). Puis des produits du quotidien (25 %) et les factures (11 %). Bien loin des écrans plats dont on nous abat les oreilles sur certaines chaines d’info.
Les effets ? Quand on ne s’inquiète plus de pouvoir manger, de survivre, on retrouve du temps. Du temps pour chercher un emploi ou changer d’emploi. A Stockton, c’est une augmentation importante du retour à l’emploi chez les bénéficiaires (passage de 28 % à 40 % de temps plein par exemple). C’est sortir des dettes. C’est inscrire les enfants au sport. C’est prendre soin de soi et de sa santé.
Les mêmes effets sont constatés ailleurs dans d’autres expériences locales.
Alors vous nous répondrez : oui mais c’est cher. A Stockton, c’est 2 millions de dollars sur deux ans pour 125 personnes. Pour rappel, la subvention de la Ville de Lille à Lille 3000, c’est 2 millions 750 000 euros.
Nous parlons donc bien ici de choix politique et de projet de société.
Pour y travailler localement, nous pouvons et nous devons nous appuyer sur le réseau associatif – ATD Quart Monde et le mouvement français pour un revenu de base. Mais aussi les instances de démocratie participative, les universitaires, les réseaux d’éducation populaire, … Redevenons le laboratoire social, ce foisonnement d’idées et d’expérimentations sociales que nous avons su être autrefois à Lille. Soyons visionnaires, ou au moins essayons.
Je suis sûre de pouvoir compter sur vous – Mesdames et Messieurs de la majorité – qui avaient soutenu en 2017 cette proposition forte du programme de Benoît Hamon. Je ne saurai croire qu’aujourd’hui, vous ayez abandonné cette idée – au moins au niveau national.
Comptant donc sur votre constance.
Je vous remercie.
