Création et réaménagement d’espaces verts : allons au-delà des petits squares et mastodontes de béton

[Après cette intervention, plusieurs élues de la majorité ont insinué que le travail réalisé par Lise Daleux, élue EELV à la nature en ville et au développement durable au mandat précédent était insatisfaisant, voir mauvais. N’ayant eu le droit de réponse pendant le conseil communal, notre groupe tient à rappeler les rapports de force défavorables aux élu.es écologistes entre 2014 et 2020, ayant amené à ce que leurs délégations se voient refusées les moyens financiers et humains conséquents aux missions qui devaient être menées.]

Stéphane Baly, co-président du groupe, conseiller municipal

Madame le Maire,
Mes chers collègues,

Je vous remercie, Monsieur l’Adjoint, pour cette présentation des avancées en matière d’espaces verts à Lille. Rappelons qu’il s’agit d’un sujet sur lequel les Lilloises et les Lillois vous attendent au tournant. Une analyse fine des projets déposés à la troisième édition du budget participatif en témoigne : 78 des 389 propositions relèvent de la thématique des espaces verts en ville. C’est de loin la première thématique qui revient, en particulier pour le quartier de Fives.

Autant de propositions que nous devons considérer comme les symptômes d’un manque, d’un besoin urgent d’espaces de nature dans notre ville. Ces espaces sont essentiels au bien-être de nos concitoyens, à la qualité de l’air et de la biodiversité. Accélérer la végétalisation de notre ville, c’est aussi s’adapter à la hausse des
températures et aux importants îlots de chaleurs urbains de notre ville.

Face à ces enjeux, vous affichez un objectif : créer ou réaménager 90 ha d’ici 2026. Objectif que vous réaffirmez dans le ROB.

Regardons donc de plus près les différents projets de rénovation et de création d’espaces de nature en cours.
719 m2 telle est la surface de l’acquisition que vous prévoyez pour la création du jardin de quartier à Wazemmes, qui est l’objet de la délibération que vous nous présentez ce soir. Parallèlement sur la plaine Winston Churchill, une surface de pleine terre dix fois plus grande sera noyée sous le béton par votre décision d’y implanter le tribunal de justice. Il faudra d’ailleurs être vigilant sur la bonne réalisation des toitures végétalisées de nouvel équipement, qui ne peuvent toutefois remplacer l’agrément que constituait l’espace initial pour les riverains.

Ralentir la bétonnisation ne suffit pas, il nous faut changer de direction. Cela veut dire relever l’ambition, changer de braquet, assumer une véritable transformation et être cohérent. Ne pas renaturer à un endroit pour bétonner à un autre sur une surface bien plus importante !

Avec cette délibération, nous parlons de 700m2, ce qui représente 0,07 ha. Aussi, quand vous parlez de 90 ha créés ou réaménagés, gardons bien à l’esprit que cela représente plus de la moitié de la surface du quartier de Wazemmes ! Si vous vous saisissez d’opportunités ici et là, la question légitime qui se pose concerne bien l’objectif de création nette de nouveaux espaces de nature.

Ce dont Lille manque cruellement, ce sont de grands espaces verts, de grandes zones de nature où pourront co-exister forêts urbaines, habitats naturels et grands espaces de promenade et de loisir pour toutes et tous. Nous pensons à la ceinture verte de la Deûle à Euralille, connectée aux communes de Saint-André et de La Madeleine et évidemment à un grand poumon vert à Saint Sauveur. Un grand poumon, pas un parc coincé, dans la zone peu constructible de Saint Sauveur qui s’inscrit dans une trame verte jusqu’au centre de Lille via la rue Pierre Mauroy en cours de réaménagement.

Ce qui ressort des budgets participatifs, c’est le désir d’une ville qui respire, des espaces de nature à la portée de tous les habitants sans le vacarme des voitures, un aménagement soutenable qui prend pleinement la mesure du dérèglement climatique. Tels devraient être les déterminants des politiques publiques lilloises dans leur globalité.

Nous ne nous s’en sortirons pas uniquement avec une opération de plantation participative sur un délaissé routier, bien que très intéressante. J’en profite pour saluer leur travail remarquable des bénévoles du collectif l’Arrassine sur le projet de plantation qu’ils mènent depuis une semaine sur l’un des échangeurs du périphérique lillois.

Enfin nous nous interrogeons fortement sur le projet de Lakanal que vous décrivez comme une école-parc.
Pourquoi pas, mais encore faudrait-il que cette décision émane d’une réflexion collective. La ville n’a même pas pris la peine d’informer et associer à la décision l’association qui anime le Jardin-Ressource
qui serait absorbé alors que cette association a obtenu un financement du département pour y entreprendre des restaurations. Il y a du mécontentement sur la façon de conduire ce projet. Encore une fois, la méthode reste à revoir.

Surtout, Fives est le quartier comptant la plus faible surface d’espaces verts par habitant : un nombre significatif de propositions d’espaces verts dans le budget participatif émane de Fivoises et Fivois. Ainsi, restreindre l’accès aux habitants à certains moments, par exemple aux grandes vacances, revient à en priver l’accès la grande majeure du temps, dans un quartier déjà si peu pourvu en espace de nature. Un nouvel espace à Fives Cail ne saurait pallier ce manque.

Comment se traduit donc réellement la promesse de créer (ou réaménager !) 90 hectares d’espaces verts ?
Combien d’hectares en création nette ? Le compte n’y est pas et n’y sera pas, si vous persistez dans cette
trajectoire de petits squares face aux mastodontes de béton que sont vos projets sur la friche Saint-Sauveur ou encore sur la plaine Winston Churchill.

L’automne est la saison des feuilles mortes. C’est aussi celle des plantations.
Alors évidemment notre groupe votera cette délibération.

Mais vous l’aurez compris, nous portons une attention particulière à la traduction de vos objectifs en projets réels et sincères dans notre ville, au-delà de l’affichage que sont les jolies photos et les inaugurations conviviales. Les calculs seront faits : si le renard a été observé à la citadelle, comptez sur moi pour vérifier si le compte est bon. Je serai le Bertrand Renard de vos engagements en matière d’espaces verts lillois.